LECON N°12

    La sagesse est vivante et par consequent toujours imprevisible.

    L’ordre est le revers du chaos.

    Le chaos est le revers de l’ordre.

    L’incertitude que vous sentez en vous est le prelude a la sagesse.

    L’insecurite accompagnera toujours le chercheur. Il trebuche souvent, mais ne tombe jamais.

    L’ordre humain est constitue de regles. L’ordre du magicien ignore les regles_il est fluide comme la vie.

L’ordre tout comme le chaos appartiennent a l’essence de la vie. Le cycle de la vie voit des configurations emergees du chaos et retourner plus tard s’y dissoudre. Le corps umain est totalement chaotique dans certaines de ses fonctions_ des atomes d’oxygene tourbillonants penetrent ans votre sang chaque fois que vous respirez, des flots d’enzymes et des proteines se deversent dans chaque cellule, meme l’activite des neurones dans votre cerveau ressemble a un orage electrique permanent. Pourtan ce chaos n’est qu’un aspect de l’ordre, car nos cellules sont sans aucun doute les elements essentiels des fonctions organiques et l’activite de notre cerveau produit des pensees coherentes. Le chaos et l’ordre sont si solidaires l’un de l’autre qu’on ne peut jamais vraiment les separer. 

Sur le plan individuel, chacun lutte avec l’ordre et le desordre. Les choses tendent a se degrader, les fruits frais et murs finissent par pourrir, ce qui est jeune vieillit et meurt. « La mort estune illusion, disait Merlin, mais la lutte que les mortels menent contre elle est tres reelle. Aucun homme ne sait ce qu’est en realite la mort, pourtant son imminence est si redoutable que chacun d’entre eux lutte contre elle de toutes ses forces sans comprendre l’incroyable desordre et le chaos qu’il provoque ainsi. »

Le magicien ait que la vie s’est toujours organisee de l’interieur. Ces memes imperceptibles tendances a la gravite qui ont fait surgir des etoiles dansantes du chaos existent a tous les niveaux de la nature. Une rose peut etre totalement certaine qu’elle deviendra une rose, meme si sa premiere pousse ne differe guere de celle d’un haricot ou d’une violette et, sous forme de graine, ses seules pretentions a la singularite resident peut etre dans d’infimes spirales de ses filaments d’ADN. Nous autres humains, en revanche, sommes tres preoccupes de reussir notre vie et nous passons un temps infini a nous demener et a nous battre pour essayer d’affirmer notre singularite.

_ Et alors ? dit Arthur, qu’importe si les oiseaux vivent sans penser ou si une rose est toujours une rose. Ils sont depourvus de pensee et n’ont donc d’autre choix que d’etre ce qu’ils sont.

_ C’est vrai. Vous autres mortels vous etes doues de libre arbitre, mais vous avez une bien trop haute opinion de lui. Je vis sans faire de choix, et cette vie est beaucoup plus heureuse, repondit Merlin.

_ Sans faire de choix ? Mais tu prends autant de descisions que moi, objecta Arthur.

Merlin haussa les epaules.

_ Tu es dupe des apparences. Regarde ta main. Il est incontestable qu’elle t’appartient, pourtant tu n’intervient pas dans la croissance de ses cellules; tu ignore comment ses nerfs et ses muscles bougent, tu n’agit pas consciemment pour que tes ongles poussent ou qu’une ecorchure cicatrise quand tu es blesse, n’est ce pas ?

_ C’est vrai je ne fais rien de tout ca.

_ En d’autres termes, poursuivit Merlin, elles ne se presentent pas comme des choix pour toi. Ces fonctions ont ete attribuees a une partie de ton cerveau qui fonctionne automatiquement et echappe donc a ta volonte. De meme, toutes les activites auquel tu consacre du temps _ penser, decider, sentir, choisir, juger _, je les ai confiees a la partie automatique de mon cerveau. Ce qui est une autre maniere de dire que je les ai remises entre les mains de Dieu.

_ Alors a quoi te sert la partie consciente de ton esprit ? demanda Arthur.

_ A profiter du monde et du miracle de la vie. Je suis le temoin de tout ce qui est et je t’assure qu’il n’existe pas de spectacle plus surprenant, plus beau ni plus satisfaisant.

 

 

LEÇON N°13 

    La realite que vous percevez est le reflet de vos attentes.

    Si vous projetez les memes images tous les jours, votre realite sera la meme tous les jours.

    Quand l’attention est impeccable, elle fait surgir l’ordre et la clarte du chaos et de la confusion.

Le magicien s’est completement libere du connu. Pour lui, l’unique liberte reside dans l’inconnu, parce que tout ce qui est connu est passe et mort. « Sais tu pourquoi je continue a dire que ton monde est une prison ? demanda Merlin. Parce que tout ce que l’esprit concoit est limite. Des que tu mets des mots sur une experience ou l’enferme dans une pensee, ou dis: « je sais «  , quelque chose de merveilleuxet d’inisible s’enfuit. Les limites sont des cages la realite est un oiseau fragile qui tremble dans ta main. Sert le trop longtemps et il meurt. »

S’il est vrai que l’inconnu est votre laissez passer pour la liberte, il est vrai que les limites procurent a l’ego un appreciable confort. Jour apres jours, notre esprit engendre les memes images. Ces images sont le miroir de ce que vous etes, bien que l’ego les prenne pour la realite. «N’est il pas evident qu’un arbre est un arbre, un mur un mur, une montagne une montagne ? «  Demande l’ego. Mais ces choses ne sont reelles que dans un certain etat de conscience, l’eveil. Dans un reve, vous pouvez etre assis dans un champ a regarder passer les nuages au dessus d’une montagne. Au reveil, vous vous apercevez que la montagne, les nuages et le champ n’etaient que l’effet aleatoire de l’effervescence de vos cellules cerebrales qui ont produit ces images fugaces. Rien ne prouve que la conscience vigile fonctionne differemment. Des montagnes, des champs, des nuages « reels » n’ont aucune realite verifiable en dehors des images qui surgissent dans votre cerveau.

Arthur etait choque que Merlin rejette le monde visible en le taxant d’illusion.

_ Mais les choses qui m’entourent sont tangibles, et meme dures! Si je me cogne la tete contre un rocher, j’aurai un bleu, objecta t il.

_ Les images ne sont pas seulement visibles, lui rappella Merlin. Tu peux aussi toucher les choses en reve et ressentir les memes sensations.

_ Alors, comment distinger le reve de l’eveil ? Pourquoi batise t on l’un realite et l’autre illusion ?

_ Par l’habitude. Si les mortels suivaient l’enseignement des magiciens ils apprendraient comment reproduire eveilles ce qu’ils font en reve. Les limites commenceraient alors a se dissoudre et la realite t’inciterait a sortir du carcan de la pseudo realite dont tu es prisonnier.

Nous faisons tous l’experience du nouveau et de l’inconnu, mais peu d’entre nous reconnaissent l’inconnu comme une force qui nous appelle. L’inconnu renferme les indices de l’autre realite. En quoi consistent ces indices ? Ils ne cessent de changer mais, si vous regardez de plus pres toutes les images que le monde vous presente, vous devellopperez une intuitionnouvelle des evenements. Leur arbitraire apparent commencera a prendre forme et sens, comme si une part de vous meme disait: « Je suis la. Peux tu me decouvrir ? » Les recontres heureuses, les coincidences inattendues, les premonitions qui se verifient, les voeux soudains exauces, les bouffees de joie inexplicables, un sentiment de comprehension profonde, de confiance naissante, tous ces instants sont les visages que prend la realite pour nous attirer hors des cages que nous nous sommes forgees. Rien ne nous force a repondre a cet appel presque inaudible. C’est a chacun d’en decider pour soi meme. Il s’agit de choisir en notre ame et conscience que le contenu rassis mais familier et l’inconnu qui est neuf et offre une palette de possibilites infinies.

 

 

 

 

LEÇON N°14

     Les magiciens ne s’affligent pas des pertes, parcequ’on ne peut perdre que l’irreel.

     Perdez tout, le reel n’en subsiste pas moins.

     Dans les decombres de la devastation et du desastre sont enterres des tresors caches.

     Quand tu regardes les cendres, regarde bien.

Les constantes transformations du monde impliquent des pertes et des gains. Pour l’ego, les ains sont bons et les pertes mauvaises, mais la nature e fait pas de telle distinctions. Tant qu’il y a creation, il doit y avoir destruction.

 » Vous autres mortels souhaiteriez abolir la mort, disait Merlin, sans penser au monde dans lequel s’accumuleraient les etres humains, les animaux et les plantes. La foret serait bientot etouffee sous sa propre vitalite, les oceans foisonneraient de creatures luttant pour leur espace vital et le fragile equilibre de la belle nature serait aneanti. « 

Le cycle de la naissance et de la mort n’engendre peur et conflit qu’en devenant personnel. Apres une vie consacree a lutter pour empecher la perte, l’ego considere la mort comme son ultime defaite. Chez la plupart des etres, la peur de la mort est trop ecrasante pour qu’il l’affrontent, c’est un probleme qui est refoule dans l’inconscient et nie dans la vie quotidienne. Ou bien la denegation est intellectualisee, la mort devient un mystere metaphysique coupe de toute emotion.

Les magiciens affirment que la mort est inconnaissable pour une autre raison, parce que l’experience normale et, avec elle, notre mode de connaissance habituel cessent au moment de la mort. L’experience normale est orientee vers ce que nous pouvons voir, entendre, toucher, sentir et gouter. A cela viennent s’ajouter la pensee et l’emotion. Mourir signifie ne plus eprouver de sensations, laisser derriere soi le monde materiel et s’acheminer vers un nouveau genre de perceptions.

_ Si seulement tu savais... Je suis deja mort dit Merlin.

_ Cela semble impossible, repliqua Arthur.

Pour moi, etre vivant signifie manger, boire, dormir et faire des experiences. N’est ce pas ce que tu fais tout le temps, exactement comme moi ?

Merlin secoua la tete.

_ Pourquoi penses tu que la vie et la mort sont incompatibles ? Au moment ou je fais tout ce dont tu parles, je suis egalement en etat de connaissance, simplement conscient de moi meme, aussi etranger a la naissance qu’a la mort. La mort rend possible la revelation d’un tel etat de conscience. Tant mieux pour toi si tu as la chance de faire cette decouverte assez tot, avant de te depouiller de ton enveloppe mortelle.

_ Tu as beaucoup de chance de ne plus avoir peur de la mort, remarqua Arthur.

_ Certes, mais c’est au prix d’une descision que la plupart d’entre vous esquiveraient. J’ai decider de poursuivre la mort et de l’embrasser comme un amant, alors que vous ne cessez de la fuircomme si c’etait le diable. La mort est tres sensible et, si vous la diabolisez, elle se detournera et gardera ses secrets. En verite, tout ce que vous redoutez a propos de la mort est une projection de votre propre ignorance. Vous redoutez simplement ce que vous ignorez.

LEÇON N°15

     Plus vous connaissez l’amour; plus vous devenez l’amour.

     L’amour est bien superieur a l’emotion. 

     C’est une force de la nature; en tant que tel,

            il renferme la verite.

      Quand vous prononcez le mot « amour »,

      Vous saisissez peut etre le sentiment,

       mais l’essence de l’amour reste ineffable.

      L’amour le plus pur reside la ou on l’attend le moins: dans le detachement.

Quand le magicien parle d’amour, ce a quoi il se refere est presque le contraire de ce que nous entendons par amour. Celui ci est pour nous un sentimen extremement personnel; pour un magicien, c’est une force universelle. L’etat amoureux est un prealable a l’amour mais ce sentiment finit par decroitre. Un magicien ne tombe pas amoureux, parcequ’il est porte par le mouvement de l’amour lui meme. Mais la difference majeure concerne l’attachement. L’attachement survient quand on dit: « Je t’aime parce que tu es mien(ne). » Cette forme d’amour n’est qu’une extension de l’ego qui pense toujours en termes de « je », « moi », »mien».

_ Vous autres, mortels, appelez amour un sentiment d’attachement total envers un autre etre, dit Merlin. Votre fantasme reside dans la possession complete de l’autre ou dans le fait d’etre completement posseder par lui. Les magiciens, en revanche, appelle amour l’absence d’attachement, de possession.

_ Mais cela, n’est ce pas simplement de l’indifference ? demanda Arthur.

Merlin secoua la tete.

_ L’indifference est atone, sans vie. L’amour d’un magicien est incroyablement vivant, il exprime l’energie universelle. Pour que cela se produise il faut ressembler a un recipient vide. Les mortels sont si emplis de leur ego qu’il ne laisse la place a rien d’autre. Un magicien est completement vide; l’univers peut donc le remplir d’amour.

Merlin parlait doucement, presque tendrement.

_ Tomber amoureux est une merveilleuse occasion pour toi, dit il. Normalement, tu t’abrites derriere les murs de ton propre ego. Tu aimes t’y sentir en surete, invulnerable. Quand on tombe amoureux, ces murs s’effondrent, au moin provisoirement. Tu es expose et vulnerable, exactement comme tu le redoutais, mais l’emotion de l’amour qui te submerge entraine un etat d’extase, et non la souffrance que tu redoutais. Dans le meilleur des cas, tomber amoureux signifie partager l’inconnu avec une autre ame, vouloir avancer ensemble dans la sagesse de l’incertitude.

Les magiciens ne considerent pas les differentes manieres d’aimer comme plus ou moins sublimes _ C’est le language du jugement et les magiciens ne jugent pas.

_ Si ton ennemi te croise et t’insulte, c’est un acte d’amour, disait Merlin. L’impulsion aimante venue du coeur de ton ennemi s’est transformee en haine en traversant le filtre de la memoire. Des experiences passees peuvent denaturer plus ou moin la manifestation de cet elan mais, ne t’y trompe pas, quelle quoi soit son expression, sa source demeure toujours l’amour.

_ Est il possible de construire une passerelle entre le genre d’amour qu’eprouvent les mortels et celui que tu ressens ? demanda Arthur.

_ Tu n’as pas besoin de construire une passerelle, car il n’existe qu’une sorte d’amour, repondit Merlin. L’amour personnel que tu eprouves pour un autre est une forme concentree de l’amour universel; l’amour universel est une forme dilatee de l’amour personnel. Tu ne peut eprouver pleinement les deux que si tu t’ouvres.

 

Suite, dernieres lecons...